Débattre des représentations sexistes, c’est possible à tout âge ! A l’ACCOORD, enfants, ados et adultes débattent en ateliers, aidés par deux sociologues qui concoctent un podcast à partir de leurs paroles. L’enjeu est aussi de faire évoluer les postures des animateurs de l’ACCOORD, dans le cadre d’un plan d’action contre les discriminations. Une table ronde rendra compte de cette expérience le samedi 26 novembre aux Assises nationales de lutte contre les violences sexistes.

« Avec vous, on va parler de comment ça se passe quand on est une fille ou un garçon ». Ce vendredi matin, dernier jour des vacances de Toussaint, la sociologue Elvire Bornand introduit l’atelier de l’ACCOORD face à 14 filles et garçons de 6 à 10 ans. Et leur propose d’échanger à partir d’images de catalogues publicitaires. L’image du gel douche bleu avec super-héros contre gel douche rose avec princesse fait beaucoup réagir. « Le bleu, c’est pour les garçons, le rose c’est pour les filles, » pose une participante, une évidence ! « Mais moi, j’aime le rose », s’indigne un garçon. « Et moi, j’aime bien Spiderman », rétorque sa voisine. « C’est pas juste, réagit un autre enfant, le gel pour les filles coûte 3€ et celui pour les garçons 2€80. Ils devraient faire le même prix, surtout que c’est peut-être le même produit avec la même odeur. »

Des images pour déconstruire les représentations

L’aspirateur vendu sous le slogan de « Bonne fête les mamans ! » ne laisse pas de marbre non plus : « C’est pas juste vu que les mamans font toujours le ménage. On doit leur faire un vrai cadeau, pas un aspirateur », s’indigne Nayeli, la plus âgée des participantes, très impliquée. « On devrait tourner, un jour chacun, pour que tout le monde nettoie, » propose Léon. Quand aux « Lego garçons », toutes et tous sont unanimes : « Il faudrait juste écrire Lego, ou Lego pour tout le monde. » Après les images, place aux dessins des cours d’école et de la place de chacune et chacun. « A l’école Stalingrad, les garçons font du foot, des petites voitures sur les rebord des fenêtres, remarque Joseph, l’aîné d’une famille de 3 garçons. Les filles lisent, s’échangent des cartes Pokemon. Le basket, c’est mixte, et l’an dernier, les CM2 organisaient un grand épervier avec filles et garçons, c’était bien. » Midi sonne, les enfants ont souvent parlé de juste ou d’injuste et les débats ont bien creusé l’appétit : il est temps de rejoindre la cantine pour Mathilde, Yanis, Émile, Mohamed, Nayeli, Léon… et leurs acolytes.

D’autres ateliers proposés à des ados et adultes

« Notre surprise, c’est que les plus avancés sur ces représentations sexistes ne sont pas les adultes mais bien les enfants », remarque Elvire Bornand. Nous avons animé des ateliers adultes et souvent, des leaders de parole hommes avaient tendance à imposer leurs vues. » L’ACCOORD a aussi proposé un atelier de 2 jours à une quinzaine de jeunes ados : « C’était un groupe de filles uniquement qui échangeaient sur leur expérience des violences sexistes », indique Killian Courtille, chargé du plan d’actions contre les discriminations à l’ACCOORD. « Elles ont remarqué que ce n’était pas simple de grandir en tant que fille, entre l’aide à la maison, et le peu de droit à sortir, précise Elvire Bornand. Mais elles sont aussi perdues sur la vision féministe avec un idéal de libération de la femme blanche et athée qui ne leur correspond pas toujours ». Par contre, toutes se sont retrouvées sur le harcèlement de rue. « Elles se sont écoutées, c’était un moment de partage fort, qui faisait pour chacune écho à une expérience vécue, » note la sociologue Frédérique Letourneux qui co-anime ces ateliers.

Un podcast à la clé

Tous ces témoignages vont être compilés dans un podcast qui sera diffusé lors des Assises nationales de lutte contre les violences sexistes. Une table-ronde croisée avec plusieurs animatrices et animateurs de l’ACCOORD restituera aussi les conclusions de cette expérience le samedi 26 novembre. « Pour nous, l’enjeu est de former et faire évoluer les postures des animateurs de l’ACCOORD. De leur donner des clés pour mieux se positionner sur ces sujets de représentations et de violences sexistes », conclut Killian Courtille.